La voie de « l’islam modéré » en question(s)
Héritière directe de l’Empire ottoman, issue du choc brutal provoqué par la Première Guerre mondiale et ses conséquences, la Turquie occupe une place singulière dans le monde musulman. Après avoir incarné l’archétype du pays laïc tourné vers l’Occident, elle s’est présentée aux républiques d’Asie centrale, à la chute de l’Union soviétique (1991), comme l’exemple d’une transition démocratique aboutie. Au tournant des années 2000, elle symbolise encore le mariage réussi de l’économie de marché, du pluralisme et de l’Islam. Havre de paix au Proche-Orient, membre de l’OTAN, candidate à l’UE, la patrie d’Atatürk faisait ainsi figure d’antidote au nihilisme djihadiste.
Or, la Turquie aujourd’hui vacille. Les manifestations du Printemps 2013, les scandales à répétition, les affres d’une politique étrangère embourbée en Syrie et l’effondrement de sa monnaie ont rompu le sortilège d’un pays qui prétendait s’ériger en modèle de l’Oumma, du Maroc à l’Indonésie. Un point de situation s’impose aux lendemains du voyage du président de la République dans ce pays « compliqué ».