Mar 092017
 

Comprendre, discerner et agir dans le monde qui vient

CLES200-1La publication de ce 200e numéro des notes CLES est l’occasion d’interroger l’apport de la géopolitique aux entreprises.

CLES pour « Comprendre les enjeux stratégiques » : qui pourrait aujourd’hui nier qu’il s’agit d’un impératif pour tout décideur ?

Et que la géopolitique est devenue une compétence indispensable dans un monde globalisé mais également tourmenté, tout à la fois « ouvert » et fragmenté ?

Pourtant, lorsque nous avons décidé d’intégrer la géopolitique à nos missions d’école de management, il y a maintenant 7 ans, nous nous sommes heurtés au scepticisme, voire à quelques ricanements…

Avant d’être progressivement rejoints par bon nombre d’acteurs. Mais n’est-ce pas le propre de ceux qui osent s’aventurer hors des sentiers battus pour défricher, expérimenter, ouvrir de nouveaux espaces à l’intelligence des hommes et des organisations ?

Aujourd’hui, deux mots-clés s’imposent dans la presse économique : géopolitique et innovation. Ce n’est en rien un hasard s’ils constituent l’ADN de Grenoble Ecole de Management. Une école dans laquelle, plus que jamais, « le futur se construit chaque jour ».

Étant moins une science ou une discipline universitaire qu’une méthode et une compétence, la géopolitique « est éducation de l’oeil, elle est repérage des carrefours entre le géographique, le politique, l’historique et l’économique » (François Thual).

Éduquer et repérer les zones de contact, de frictions et d’échanges où vont naître les événements porteurs d’avenir : avec le recul, l’appropriation de la géopolitique par une école de management relève de l’évidence !

La géopolitique dans une Business School : pari réussi !

En ayant fait le choix en 2010 de placer la géopolitique au coeur de sa stratégie et de ses formations, Grenoble Ecole de Management entendait affirmer que la compréhension de cette « matière » est devenue l’une des principales clés de la prise de décision des managers et des entreprises.

Nous avons voulu un dispositif complet, s’articulant autour de notre mission première, la pédagogie, avec des contenus adaptés, mais aussi des publications originales et un festival annuel conçu comme le lieu d’expression de toutes les géopolitiques, sans esprit de chapelle ni oeillère idéologique.

Et depuis 7 ans, quel chemin parcouru ! Nous avons abordé des sujets auxquels nous ne pensions pas spontanément, comme la géopolitique de l’imaginaire ou celle du whisky, fait profiter nos lecteurs de très belles rencontres réalisées dans le cadre des entretiens mensuels, conçu des cursus originaux et des formations diplômantes, construit des partenariats – notamment dans le cadre de doubles diplômes avec l’IRIS et l’institut Bioforce spécialisé dans le management des ONG…

Avec toujours une conviction : permettre aux étudiants d’aller au bout de leur spécialisation.

Si la géopolitique est à la mode, le terme reste complexe, voire quelque peu abstrait pour les entreprises. Celles-ci ont pourtant pleinement conscience que, face aux inquiétudes que suscite le monde qui vient, il leur faut disposer d’outils robustes de compréhension de leur environnement et de pilotage de leur stratégie.

La promotion d’une géopolitique multidisciplinaire, résolument réaliste et accessible à tous, constitue plus que jamais notre mission de Business School.

Notre ambition ? Faire acquérir à nos étudiants une vraie compétence en géopolitique, en termes de savoir faire et de réflexes, de principes et d’outils à utiliser au sein et au profit de l’entreprise.

Avec en ligne de mire un travail sur les référentiels de compétences, la formation et finalement les métiers.

Un enjeu de compétences pour les entreprises

La dissémination de la compétence géopolitique au sein des entreprises reste un défi.

Car elle est à la fois une compétence et une grille de lecture qui s’adapte à différents métiers couvrant aujourd’hui un spectre très large, de l’intelligence économique au risk management, en passant par la cybersécurité, le marketing international, la direction sécurité-sûreté, la responsabilité de zones ou de sites d’exploitation…

En tant qu’école, nous avons fait vivre et admettre les liens qui unissent la géopolitique, l’entreprise et les sciences de gestion, qui intègrent progressivement dans leurs recherches la dimension géopolitique.

La pleine intégration de celle-ci à l’entreprise reste à réaliser autour de trois axes.

En premier lieu, celui de la compétence : qu’est-ce que cela suppose pour l’organisation ? Comment évaluer cette compétence ? Comment l’intégrer au processus de recrutement et de sélection des cadres dirigeants ?

Ensuite, il faut en assurer la dissémination, la diffusion au sein de l’entreprise, à l’image de l’innovation, en encourageant les réflexes d’analyse géopolitique.

Avec comme principale difficulté les différences d’approche en fonction de son activité : la Russie n’est pas abordée de la même façon par Auchan, la Société Générale ou une PME technologique.

Enfin, la géopolitique est à la fois spécifique et évolutive : ce qui est valable et pertinent à un instant T peut être remis en cause une heure plus tard – avant d’être de nouveau pertinent le lendemain.

En apprenant à distinguer l’écume des faits des permanences qui structurent le réel, à gérer le temps court en prenant en considération le temps long, la géopolitique oblige à repenser son rapport au temps.

En ce sens, elle est de nature stratégique pour toute organisation.

GEM va continuer à évoluer pour accompagner ses étudiants et ses partenaires. Aux côtés des notes CLES et de leurs hors-série sous forme d’entretiens exclusifs, nous proposons cette année l’analyse de « cas d’école », c’est-à-dire d’entreprises, de produits, de marchés ou encore de zones géographiques dont le développement s’articule avec une approche bien comprise, concrète, de la géopolitique.

Travailler sur les enjeux géopolitiques nécessite de s’adapter aux soubresauts du monde, mais aussi à l’innovation croissante des acteurs économiques.

Quels seront les grands enjeux pendant la présidence de Donald Trump ?

Quelle place pour la Russie, la Chine et les pays européens ? Comment se positionneront nos entreprises, alors que s’affirme la revendication d’une véritable filière du renseignement ?

La dimension numérique des transformations en cours est ici essentielle. Le numérique va changer non seulement notre vision du monde, mais aussi l’état de celui-ci.

Il contribue en effet à modifier l’état des frontières, des comportements et des relations entre acteurs, introduisant de nouveaux progrès mais aussi de nouvelles menaces.

S’adapter en conscience au monde qui vient…

« Le monde à venir s’annonce rude« , estime l’ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine (Continuer l’Histoire, 2007). Mais il le sera plus encore pour ceux qui refusent d’apprécier la gravité – au sens de loi physique – de la situation.

En 2016, le Brexit, la présidentielle autrichienne et l’élection de Trump ont attesté de la montée en puissance des critiques de la mondialisation, qui semble par ailleurs connaître une pause voire un reflux si l’on observe les chiffres du commerce international, notamment chinois.

Et cette année devrait être tout aussi décisive, avec les élections aux Pays-Bas, en France, au Danemark et en Allemagne, dont les résultats auront un impact direct sur l’activité économique et, plus largement, le rapport qu’entretiennent les pays de la « Vieille Europe » à la fois entre eux et avec le reste du monde. Il y a indubitablement un « effet papillon » à prendre en compte.

Très concrètement, une clause apparemment secondaire dans un accord de libre-échange peut bouleverser les marchés d’une entreprise, une facturation en dollars avec un partenaire iranien peut en conduire une autre devant les tribunaux américains, quand une troisième devra se justifier devant les médias et donc ses parties prenantes, à Paris, pour avoir pensé assurer la sécurité de l’un de ses sites de production en finançant discrètement la faction armée la plus active sur le territoire d’implantation de l’un de ses sites de production, loin de chez nous, en Afrique ou au Proche-Orient…

La géopolitique n’est donc pas seulement une discipline utile et porteuse. Elle apparaît aujourd’hui indispensable, tant pour les entreprises que pour les étudiants en école de management, confrontés à un environnement décisionnel instable, imprévisible, chaque jour nouveau.

C’est notamment ce que soulignent Nathalie Dupuis-Hepner et Gilles Le Gendre, membres des Company Doctors, dans une tribune pour Les Echos (« Comment former les managers à la complexité du monde« , 28/10/2013) : puisque « les sujets sociétaux, technologiques ou géopolitiques sont autant de défis pour l’entreprise« , il convient de « transmettre le savoir nécessaire aux dirigeants« .

En permettant de développer la culture générale, l’interdisciplinarité, l’esprit critique mais également l’éthique, la géopolitique est un paramètre impératif dans la mise au point des stratégies entrepreneuriales et, plus largement, organisationnelles.

Elle est d’autant plus importante qu’elle embrasse un périmètre très large, « du macro au micro ». C’est pourquoi ce 200e numéro des notes CLES ne constitue qu’un jalon dans le travail engagé il y a 7 ans.

Nous vous souhaitons une fructueuse lecture des 200 prochains numéros et vous donnons d’ores et déjà rendez-vous au Festival de Grenoble !

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